Observation d'une séance d'orthographe en CM1 - Extrait memoire Isabelle Salvador
L’effectif de la classe est de 12 élèves âgés
de 7 à 9 ans. Lors de ma visite dans cette classe, le
professeur titulaire était absent. C’est une personne qui intervient ponctuellement qui a pris la
classe en charge. La séance observée était une séance d’orthographe et plus précisément l’écriture
d’une dictée avec une correction collective. La plupart des dictées sont créées
par les enseignants et portent sur le vécu des élèves : description d’une journée, visite d’un
musée, (méthode conforme à la pédagogie Freinet). Les enfants ont eu beaucoup de difficultés à
se mobiliser. L’intervenante les a informés qu’elle allait lire la dictée et qu’ensuite
elle leur dicterait. Les élèves ont fait de nombreux commentaires ainsi que lors de la lecture par
l’intervenante de la dictée en entier : « Est-ce qu’elle est facile ? », « Est-ce qu’elle est longue ? », « Oh non, je préfère déserter. », « On ne peut pas faire un jeu ? »
« On peut faire des maths ? », « J’en ai jamais vu d’aussi longue et je
déteste écrire. » l’enfant s’est mis à pleurer. « Je veux aller vivre dans la jungle et observer
les animaux, là on n’écrit pas. », « Elle est trop longue. » approbation de tous. Après avoir rassuré l’enfant qui pleurait, lui
avoir expliqué que même pour observer les animaux, il aurait besoin de prendre des notes
car on ne se souvient pas de tout, et après avoir précisé la nécessité de s’entraîner à
écrire, la dictée a pu commencer, suivi d’une phase de relecture, puis de correction.Tous les élèves ont finalement écrit la
dictée. J’ai pu constaté que leur niveau était très hétérogène. 1 - Un enfant a écrit la dictée de mémoire, après
la première lecture, entièrement. Par contre il n’a accordé aucun soin à son écriture et peu d’attention
à l’orthographe. Il donnait l’impression qu’il ne voyait aucun intérêt à
ce genre d’activité et cherchait juste à s’affranchir de son travail le plus vite possible, aussi
vite que sa pensée, sa main ayant du mal à suivre sa rapidité. Pendant que les autres
terminaient leur dictée, il a joué avec son matériel fait selon lui des « champs de force », s’est écrit
sur les mains… Même s’il donnait l’impression de ne pas écouter lors de la correction
collective, il savait pourtant répondre aux questions quand il était interrogé.
2 - Une autre petite fille baillait, posait sa
tête sur la table, semblait épuisée. Son écriture était appliquée mais elle avait d’importantes
lacunes orthographiques, même sur de petits mots fréquents. En fait, j’ai su à posteriori qu’elle
souffrait de troubles aphasiques, qui se caractérisent entre autre par l’incapacité de
faire correspondre écrit et oral. Un enfant qui souffre de ces troubles peut épeler
correctement un mot mais mal l’orthographier à l’écrit. Pendant la phase de révision, toute la dictée
a été réécrite par groupe de mots au tableau. Chaque mot a été épelé par un élève. L’intervenante
demandait aux autres s’ils étaient d’accord et cela donnait lieu à des
commentaires et justifications. D’autres réactions des élèves sont
intéressantes à rapporter car elles sont révélatrices de certaines de leurs spécificités : 3 - L’intervenante a demandé à
un élève : Comment s’écrit le mot invariable maintenant ? La réponse de l’enfant, « M O T I N V A …. ", Cette réponse est révélatrice
du fait qu’ils prennent les mots au pied de la lettre.
Sans connaître cette spécificité, des enseignants auraient pu penser que c’était une
provocation. 4 - un des plus âgé de la
classe (9 ans) a été isolé, car trop agité. Réaction « Je commence à péter les plombs » Un de ses
camarades m’a alors dit : « Il va tomber en dépression. Mais il veut toujours se faire
passer pour une victime. Moi j’ai été une vraie victime psychologique. J’ai eu des
punitions bien plus graves dans mon ancienne école et la maîtresse ne disait rien
aux autres quand ils me frappaient.», ces interventions montrent que dans certains
cas ces enfants ont eu une souffrance qu’ils verbalisent sans difficulté. Néanmoins la correction collective m’a paru
trop longue. Je l’aurais envisagée d’une façon plus différenciée en constituant des groupes
de besoin : - Un groupe sans difficulté et assez rapide :
tâches à réaliser : comparer leurs dictées respectives et discuter en autonomie sur les
graphies différentes de mots en expliquant leurs choix. Rendre une dictée négociée commune ou
bien leur dictée individuelle corrigée. - Un groupe ayant des difficultés d’écriture
(lenteur) : tâches à réaliser : écrire qu’une partie de la dictée, avec pour consigne de s’appliquer
à écrire. Pendant que les autres finiraient leur dictée, j’aurais souligné les erreurs
commises par chacun demandé aux enfants de les corriger en individuel, avec une aide possible
des autres dans un deuxième temps et du dictionnaire (consultable par tous d’ailleurs).
Une autre solution, un enregistrement audio de la dictée à « vitesse réduite » et plus courte
qui permettrait à ces enfants de travailler selon leur rythme. En effet ils pourraient revenir
en arrière pour écouter de nouveau, sans pénaliser ceux qui écrivent plus vite. L’inverse
peut aussi être envisagé. Mais cela nécessite des investissements matériels (magnétophones
ou radio cassettes munis de casques). - Un groupe avec des difficultés importantes
en orthographe : questionner les élèves pour indiquer les mots sur lesquels une réflexion
est nécessaire (qui fait çà ? Combien il y en a ?).Correction avec l’enseignant, aide
méthodologique sur comment on se relie, insistance sur le repérage des régularités de la langue
française.
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